Malédiction de l'abeille (4/7)

Publié le par Chimaera

 

– Qui êtes-vous ? murmura Libs, avant de se reprendre aussitôt. Oh, pardon. Je suis le capitaine Sébastien Libs. Voici le général Meyer, le docteur Schweitzer et miss Schamschula, qui est entomologiste.

– Je m'appelle Ashalen Lamedor et j'apporte un message de mon peuple qui étouffe à cause de ces abeilles. Il semblerait que votre problème ait des répercussion assez fâcheuses chez nous.

– Nous faisons tout ce que nous pouvons pour le résoudre, assura Libs.

– Mais vous ne trouvez pas, n'est-ce pas ?

– Non, admit le général.

– Hm... c'est fâcheux. J'ai bien fait de venir, alors. Pouvez-vous me dire quand cela a commencé ?

Le général saisit une feuille.

– Sept heures neuf ce matin, la police reçoit l'appel d'une vieille femme, agressée par des abeilles en nombre. Sept heures dix-huit, nous perdons le contact avec la patrouille envoyée sur place, non sans qu'ils ne nous envoient les images de murs recouverts de millions d'insectes. Depuis, leur périmètre d'action s'étend sur environ cinq kilomètres de rayon, soit les quarties du Domaine, de la Nouvelle-Ferme, du Nouveau-Village, du centre-ville sur une grosse partie, de la ville au Sud...

– La carte est plus explicite, mais merci, interrompit aimablement Ashalen.

Il avait en effet les yeux fixés sur la carte affichée au mur.

– Ça ne s'étend plus depuis quelques heures, n'est-ce as ? questionna-t-il.

– Ou alors très peu, acquiesça le docteur.

– Ça ne grandira plus alors. Mais, Epona, c'est une sacrée aire d'effet...

– Vous savez ce que c'est ? Interrogea impatiemment le général.

– J'ai bien une idée, répondit Ashalen, hésitant. Mais... c'est une surface énorme...

– Dites toujours, fit Libs, inhabituellement sérieux. Rien de ce que nous avons tenté n'a fonctionné. Insecticides, feu...

– C'est normal, répondit Ashalen. Ces abeilles sont déjà mortes.

Un moment de silence stupéfait répondit à sa déclaration. Il n'attendit pas de questions avant de poursuivre.

– Vu les effets, je pense qu'il s'agit d'une malédiction. Tout concorde : zone d'effet dans un cercle parfait, reproduction infinie et immortalité des créatures en jeu. Je dirai même qu'il s'agit d'une malédiction humaine, puisque nous ne sommes pas agressés.

– Les malédictions n'existent pas, fit l'entomologiste d'une voix sèche.

– Et les farfadets n'existent pas, pourtant je vous parle. Les abeilles ne sont pas agressives, pourtant elles vous massacreront à la première occasion. Les malédictions n'existent pas ? Et les pluies de sauterelles, dans votre bouquin sacré, vous croyez que c'était quoi ? Une intervention divine ?

Le silence lui répondit et il leva les yeux au ciel, grommelant quelque chose sans sens distinct.

– Admettons, fit soudain Libs en le regardant attentivement. Est-ce que vous pouvez la lever ?

– Non, répondit catégoriquement Ashalen. C'est de la magie humaine, il n'y a que des humains qui peuvent la contrer.

– Vous savez comment faire, alors ? interrogea le général.

Ashalen hésita, se tortillant sur place avant de s'asseoir sur le bord du bureau.

– Oui et non, finit-il par répondre. Ce n'est pas exactement la même chose que chez nous. Il faudrait que vous trouviez un ritualiste humain, je pourrai l'aider, mais sans plus.

Le silence retomba.

– On va passer pour fous si on demande ça, fit Libs vers ses collègues.

– Est-ce qu'on a le choix ? demanda amèrement le général.

– J'en connais une, fit joyeusement Ashalen. Elle est très gentille, elle acceptera sûrement de vous aider. C'est la seule humaine avec qui je discute régulièrement.

– Vous avez un moyen de la joindre ? s'enquit Meyer.

– Euh... elle m'a donné un numéro de... téfétone, je crois.

– Téléphone ? corrigea Libs.

– C'est ça.

Il fouilla un moment dans ses poches, sortant un bocal en verre contenant une unique abeille qu'il posa sur la table, puis un bout de papier recouvert de numéros, qu'il lui tendit. Libs le saisit, puis attrapa le téléphone le plus proche et composa le numéro, avant de lui tendre le combiné.

– Comment ça marche ? interrogea le petit homme.

– Il suffit de parler dans le trou du bas et d'écouter dans le trou du haut, expliqua le capitaine.

– Ah...

Ils avaient mis le haut-parleur, mais à peine le numéro avait-il décroché que Ashalen avait commencé à parler à toute allure dans sa propre langue aux consonances chantantes. Il poursuivit ainsi une dizaine de minutes, décrivant la situation très précisément en rajoutant des détails qu'il n'avait pas dit aux autres humains parce que cela ne les regardait pas. Puis finalement il se tut et ils raccrochèrent en même temps.

– Elle arrive, indiqua-t-il simplement.

Le silence retomba ensuite pendant plusieurs très longues minutes. L'air renfrogné de Ashalen les empêchait de lui poser des questions – de toute évidence, il n'était pas ravi d'être ici, au milieu d'humains.

– C'est une de ces abeilles ? finit par demander la femme entomologiste.

Ashalen ne daigna répondre que d'un acquiescement.

– Je peux les regarder ?

– Ne la blessez pas, elle en aura sûrement besoin pour déterminer de quelle malédiction il s'agit, répondit-il mécaniquement.

Schamschula souleva le bocal, le regardant par transparence.

– C'est une abeille tout à fait ordinaire, finit-elle par dire. Très courante dans nos régions, je crois qu'elle se repose.

Elle continua patiemment son analyse, mais n'obtint aucun réaction lorsqu'elle tapota la paroi. Soudain un soldat entra à la hâte et exécuta un bref salut.

– Quelqu'un demande à vous voir, fit-il d'une voix étranglée.

Ashalen se leva d'un bond.

– Ah, enfin ! Elle a pris son temps.

– Faites entrer, commanda le général.

– Général, elle ne... les abeilles ne l'attaquent pas...

– Faites entrer !

Publié dans Indépendants

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G
<br /> hannn tu nous laisse en suspense la !<br /> suite!<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Ce soir pour la suite, cet aprèm je vais au cadastre voir les plans de Strasbourg de l'époque napoléonienne ^^.<br /> <br /> <br /> <br />
K
<br /> Je persiste. Curieuse superposition, il me faut le temps de m'habituer. Ce qui n'enlève rien au suspense, tu as l'art de tenir tes lecteurs en haleine !<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Merci du compliment.<br /> <br /> <br /> <br />